Page 105 - Rapport annuel économique 2022 - Guyane
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Depuis novembre 2015, le CNES et les agences spatiales allemande et japonaise ont initié le développement d’un petit lanceur spatial entièrement réutilisable nommé Callisto125. Son premier vol est prévu à Kourou en 2024.
Un autre démonstrateur de premier étage, Thémis, est en projet depuis 2019 et associe le CNES, ArianeGroup et d’autres partenaires sous l’égide de ArianeWorks126. Ses essais complets sont programmés pour 2025 au CSG. Callisto, puis Thémis, doivent démontrer la capacité des Européens à utiliser la technologie de lanceurs réutilisables.
2.3 L’IMPORTANCE DE L’ACTION PUBLIQUE
L’accès à l’espace fait partie des conditions de l’indépendance stratégique des États. L’essor du secteur demeure donc dépendant des politiques spatiales de ces derniers. En effet, les États achètent des satellites via leurs agences spatiales, effectuant des lancements et soutenant des entreprises privées via des engagements financiers127. Ainsi, Arianespace bénéficie d’une contribution financière des États membres de l’ESA (environ 120 M€ par an). Selon Arianespace, la société SpaceX réaliserait quant à elle une discrimination par les prix en proposant ses services à des montants deux fois supérieurs sur le marché institutionnel américain par rapport au marché commercial, ce qui constitue un moyen indirect de bénéficier de subventions.
Un budget record de 14,4 Mds€ a par ailleurs été alloué à l’ESA pour la période 2020-2024, dont 7,2 Mds€ en 2022 et 7,1 Mds€ en 2023. Néanmoins, le budget de l’ESA reste inférieur à celui de la NASA, qui s’élève à 26 Mds$ pour la seule année 2023. Les concurrents américains d’Arianespace bénéficient exclusivement de ce marché, car le « Buy American Act » empêche une entreprise étrangère de se positionner sur le marché du transport de satellites institutionnels. Par conséquent, pour soutenir sa politique face à ses concurrents, l’ESA a soumis à ses États membres une résolution à l’été 2021 visant à garantir la pérennité d’Ariane 6 en s’engageant sur un nombre minimum de lancements institutionnels, pour un effort supplémentaire de 140 M€ par an durant 6 ans.
La nature du projet spatial européen implique une règle de retour géographique : dans la mesure où une dizaine de pays participent à la fabrication d’Ariane 6, les emplois générés doivent être distribués géographiquement à hauteur des apports au budget. Toute une chaîne logistique impliquant les différents acteurs doit être coordonnée avant les lancements réalisés à Kourou. Ces problématiques logistiques et de gouvernance sont des désavantages structurels face à des concurrents privés plus centralisés.
125 Cooperative Action Leading to Launcher Innovation in Stage Toss-back Operations.
126 ArianeWorks est le fruit d’une démarche pour l’innovation des futurs lanceurs et tournée vers la coopération entre start- up, laboratoires et industriels.
127 Certains secteurs stratégiques, dont le spatial, sont structurellement déficitaires en raison de coûts extrêmement élevés, notamment en recherche et développement, qui ne peuvent être rentabilisés sur des marchés étroits et concurrentiels. Les États, conscients des enjeux stratégiques de ces filières, les soutiennent donc financièrement via la commande publique.
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